Les principes
Depuis l’après-guerre, le système d’assurance chômage était
fondé sur deux principes :
Ce système était financé par des cotisations sur nos salaires.
L’équilibre financier de la caisse d’assurance chômage,
l’Unedic, cogérée par le patronat et les grandes confédérations
syndicales est menacé par la croissance du nombre d’indemnisables
qui exige, en toute logique, une augmentation des cotisations
chômage à la hauteur du risque réel.
87% des embauches se font en CDD
(Dares analyses n° 70 octobre
2017), 30 % des CDD ne durent qu’une seule journée.
La majeure partie des salariés ne restent pas plus de deux ans chez
le même employeur. Les patrons nous imposent l’hyper-flexibilité,
la précarité, la discontinuité... c’est à eux de financer le
risque chômage et tous les risques liés à nos contrats de travail.
Il s’agit de défendre une assurance chômage juste, pour tous, qui
ne laisse personne sans salaire ni allocation : un jour
travaillé doit être payé et bien payé, un jour chômé doit être
indemnisé avec un taux de remplacement à 100 % du meilleur
salaire.
Les "négociations"
Tous les 3 ans, la convention d’assurance chômage fait l’objet
d’une “négociation” entre syndicats et patronat. Les
conditions des “négociations” de la convention d’assurance
chômage sont scandaleuses. En amont de chaque "négociation",
le gouvernement fixe le cadrage budgétaire, les objectifs
d’évolution des règles du régime d’assurance chômage et le
délai dans lequel cette "négociation" doit aboutir.
Autour de la table de "négociation" aucune
personne n’assure la défense et l’intérêt des chômeurs.
Le patronat y est tout puissant : tout se passe au siège
parisien du Medef (Mouvement des entreprises de France) et les seules
propositions discutées sont les siennes. En fait de "négociation",
ce ne sont qu’interruptions interminables de séance permettant des
conciliabules de couloirs et des arrangements bilatéraux entre amis
hors de la salle.
A chaque "négociation", les droits des chômeurs sont
un peu plus restreints. Le patronat et les grandes confédérations
syndicales attaquent les régimes d’indemnisations spécifiques aux
métiers de l’intérim (annexe 4 supprimée en 2017) et du
spectacle (annexes 8 et 10 progressivement vidées de leur contenu
depuis 2013), des métiers par nature discontinus et précaires. Ce
qu’ils attaquent c’est tout simplement l’existence d’un
régime de protection sociale fondé sur la solidarité et la
mutualisation. Le régime d’indemnisation des
intermittents, qui s’avére, contre toute communication partisane,
un excellent système ni plus ni moins déficitaire que les autres
régimes, peut servir de modèle à l’accompagnement social des
mutations du monde du travail. C’est cela que le patronat
craint et attaque !
A quoi servent les minima sociaux ?
Le patronat et les grandes confédérations syndicales ont, d’un
commun accord, choisi de confier à l’état le soin d’assurer un
revenu minimal et une protection au rabais à ceux dont le travail ne
veut plus. Ainsi est né, parallèlement au système d’assurance
collective, un système financé par l’impôt (ASS,
RSA,
allocation
des travailleurs indépendants et autres minima sociaux), que nos
bureaucrates ont en toute bonne conscience baptisé “solidarité”
quand il ne s’agit en fait que d’une forme de charité publique,
intervenant dans les strictes limites imposées par la
nécessité du maintien de la paix sociale.
Dans un pays où l’état est traditionnellement légitimé à
intervenir pour garantir une certaine cohésion entre les classes, on
ne s’étonne donc pas que les gouvernements successifs affichent
"la lutte contre le chômage" comme une de leurs priorités.
Ce discours leur permet surtout de contribuer à la baisse des
salaires et à faire avancer la précarité en introduisant, à
destination des chômeurs de longue durée, de multiples sous-statuts
de salariés. Autrement dit, pas question de faire quoi que ce soit
qui puisse remettre en cause l’utilité du chômage pour les
détenteurs du capital. Étant donné l’importance de l’enjeu, on
comprend bien que seul un rapport de forces impressionnant pourrait
contraindre le gouvernement à un recul dans ce domaine.
Le financement par l’impôt
Depuis la loi pour « la liberté de choisir son avenir
professionnel » du 5 septembre 2018, les salariés ne se voient
plus prélever aucune cotisation chômage sur leur salaire. Ce sont
tous les Français qui contribuent à financer les allocations
chômage, via un impôt - la CSG - directement versé à l’état
qui en dispose à sa guise :
l’état décide quelle part de
son budget doit être affectée au financement de l’assurance
chômage,
l’état fixe les règles du régime d’assurance chômage
par décret.
Le montant des allocations chômage baisse
puisque les salariés n’y contribuent plus directement :
les allocations mensuelles sont
recalculées à la baisse et sont plafonnées en cas de cumul,
retour de la dégressivité, pour l’instant appliquée sur
les indemnités les plus élevées avant de s’étendre à tous.
Une usine à gaz
L’assistance par l’état s’opposant à la solidarité par la
cotisation salariale, on aboutit au constat largement partagé que la
réglementation de l’Unedic est une usine à gaz. En
témoigne la naissance d’un minimum social baptisé allocation
des travailleurs indépendants de 800 € par mois qui pourrait
être accordé pendant 6 mois à condition de remplir ...4
pages de conditions !
Comprendre la logique des règles d’indemnisation permet de
démystifier le pouvoir des institutions de gestion de la précarité
et de commencer à être moins désemparé face à l’administration.
Pour tenter d’y parvenir, nous avons découpé ces règles en une
quarantaine d’articles regroupés sous le titre Droits
à indemnisation définis par le décret
n°
2019-797 du 26 juillet 2019 relatif au régime d’assurance
chômage. Depuis cette date, ce sont des princes et princesses qui
gèrent l’assurance chômage et font évoluer ces règles par des
décrets, arrêtés et ordonnances. Le 25 novembre 2020, le décret
n° 434920 du conseil d’état a annulé le mode de calcul
de l’allocation chômage. Puis, le 22 juin 2021, le décret
n° 452210 du conseil d’état a « suspendu »
le mode de calcul de l’allocation chômage. Après ces décrets
rendus en urgence, les recours « au fond » des syndicats contre le
décret réformant l’assurance chômage devraient être jugés par
le Conseil d’État d’ici quelques mois. En attendant, plus d’un
million de salariés qui alternent emploi et chômage vont subir une
amputation de leur allocation chômage.
La gestion des caisses de sécurité sociale par
les salarié.es eux et elles-mêmes et leur financement par le
salaire socialisé mettraient un terme à cette mystification.