Les
conservatoires de musique, danse, théâtre et arts plastiques sont,
pour rappel, depuis leur origine en France, créés ou gérés par
les collectivités locales, indépendamment de l’Etat. Et les
écoles de musique associatives sont quant à elles financées
jusqu’à 49 pour cent par les collectivités.
Alors
qu’est venu faire l’Etat là-dedans ? Rien de plus en terme
de financement car il a toujours été absent, sauf inscrire ces
établissements dans le cadre des réformes et des lois de
« décentralisation » : Loi de décentralisation
Fillon, Loi Organique sur les finances (LOLF) et création des
« schémas départementaux de territoires » en 2007
chargés d’inciter financièrement les communes à regrouper leurs
compétences culturelles d’enseignement artistique…
La réalité est toute
autre : c’est une recentralisation des pouvoirs de gestion de
cette compétence d’enseignement aux mains des Communautés
d’Agglomération au lieu d’une décentralisation auprès des
communes. Le nom donné parfois aux établissements qui ont été
transférés aux communautés est assez révélateur d’un
auto-centrisme et peut friser le ridicule : certains se
proclament « Pôle » (avec le côté assez lourdingue et
m’as-tu-vu de ces dénominations (l’air de dire « regardez-nous,
nous sommes incontournables, voir intouchables…»). « Pô-pôl »,
ça pourrait sonner un peu boulet. L’idée centraliste sous-jacente
en tout cas n’est certainement pas la bonne.
A
l’inverse, l’idée démocratique de « réseau » entre
les communes (plus collaborative et non dirigiste) a été vite
écartée par les Présidents des Communautés d’Agglomération qui
se sont fait confier ces nouvelles responsabilités lors de leur
création.
Plus
l’entité gestionnaire est grosse, plus la transparence est
absente. Il faut donc être perspicace pour découvrir qu’en
réalité les conservatoires gérés par des intercommunalités
coûtent plus cher à l’ensemble des communes que ce qu’ils
coûtaient auparavant à chacune d’entre elles. Aucune
intercommunalité ne va le dire, mais la part d’impôts finançant
ces structures fait partit des impôts communautaires et sont
répercutés sur les communes, donc sur leurs administrés. Le nombre
de cadres gestionnaires (administratifs et pédagogiques) n’a pas
diminué et a même souvent augmenté dans les conservatoires passés
en Communauté d’Agglo, sans compter les cadres propres à ces
intercommunalités qui sont en liaison. Les besoins ont augmenté
pour faire ce qu’auparavant chaque structure faisait déjà, car
le fonctionnement d’une structure unique centralisée est
complexifié.
Du
côté des personnels et des recrutements, la même logique
prédomine : une telle communauté d’agglomération va se
vanter de posséder 150 enseignants mais ne va en recruter aucun. Le
personnel transféré qui était déjà fonctionnaire titulaire
(souvent la génération intégrée depuis longtemps par les
communes) va le rester mais la génération moins ancienne arrivée
tout juste à temps avant le transfert des personnels ne verra pas la
différence bien qu’étant déjà en CDI. Quant à ceux qui ne sont
pas déjà dans le sérail de la communauté (par exemple en ayant
fait des concerts gratuitement sur ce territoire pendant 10 ans,
etc.), ils ne seront jamais intégré ou décrocheront, à compétence
prétendument d’excellence musicale, un brillant CDD au 1er
échelon du grade le plus bas des diplômés du baccalauréat.
Artistes dans l’âme, il suffira de les flatter un peu sur les
qualités requises pour les motiver pleinement dans le rôle.
C’est
comme ça qu’en Seine et Marne ou ailleurs, les Intercommunalités
gèrent sans vous le dire votre culture, votre argent et dans un cas
plus rare, votre carrière. Un vrai agglomérat de missions
impossibles en communauté.